Faut-il avoir peur de l’épisiotomie ?

26 avril 2019

episio

L'épisiotomie, c'est un peu le grand méchant loup des mamans. Cette incision d'environ 2,5 cm à 5 cm de long se pratique pour faciliter le passage du bébé au moment de l'accouchement. Alors qu'elle était pratiquée quasi-systématique en France il y a quelques années, elle est devenue plus rare aujourd’hui.
Dans le monde, les femmes ne sont pour autant pas égales devant "l’épisio", certains pays la pratiquant plus que d’autres. D'ailleurs, certaines femmes décrivent cette intervention comme un acte de violence obstétricales pouvant avoir des répercussions sur leur sexualité, leur vie de femme et de maman.
Alors, faut-il avoir peur de l'épisiotomie ? Pourquoi est-elle est encore pratiquée ? On répond à toutes vos interrogations avec l'aide de Sanni Comte, sage-femme à l’hôpital des Diaconesses à Paris.

1. Le déroulement d’une épisiotomie

L’épisiotomie est une incision du périnée (c’est-à-dire l’ensemble des muscles qui soutiennent les organes génitaux) lors de l’accouchement, afin de faciliter la sortie du bébé. A ce moment-là, le périnée est tendu au maximum. Comme l’explique Sanni Comte, sage-femme depuis 15 ans à Paris :

« Si le rythme du bébé le permet, l’équipe attendra que votre périnée se distende au maximum afin d’éviter épisiotomie. Dans certaines maternités on propose même de l’acuponcture, de la digiponcture et des massages périnéaux pour détendre le périnée pendant le travail ».


On imagine souvent que l’incision est médiane toute droite, or on la pratique généralement de biais (c’est ce qu’on appelle l’épisiotomie « médio-latérale ») vers la droite ou la gauche (le plus souvent à droite car la majorité des praticiens sont droitiers. La suture est réalisée immédiatement après l’accouchement et la délivrance du placenta avec des fils qui se résorbent en 10 jours. La cicatrisation sera complète sous 3 semaines à 1 mois.

2. Dans quel cas y a-t-on recourt ?

Certaines femmes décrivent l’épisiotomie de manière forte, comme un acte de violence. D’ailleurs ce sujet qui a fait l’objet d’un grand débat en France, a classé l’épisiotomie dans le registre des "violences obstétricales".

Pendant des années, on a recommandé aux obstétriciens et sages-femmes de pratiquer l’épisiotomie presque systématiquement pour :
- un premier accouchement
- pour mettre au monde les gros bébés
- lors de l’utilisation d’instruments pour parvenir à extraire le bébé (forceps, ventouse, spatules)
- en cas de péridurale
- sous prétexte que la maman ne peut pas bien pousser
- lorsque le bébé est en souffrance fœtale.
Mais aucune étude n’a permis de prouver l’intérêt de l’épisiotomie systématique dans tous ces cas.

Pour Sanni Comte, nous sommes aujourd’hui loin de ces pratiques-là.

« L’épisio est pratiquée uniquement quand il faut hâter la naissance du bébé (comme dans le cas d’un ralentissement du rythme cardiaque du bébé). Si on ne peut pas attendre que le périnée se distende ou lors d’extraction instrumentale avec l’impression qu’il pourrait y avoir une déchirure profonde, là on va la pratiquer. D’ailleurs le seul cas où l’épisiotomie est indiquée de façon systématique est lorsque l’espace entre l’anus et l’ouverture du vagin est court, c’est-à-dire inférieur à 2 cm et c’est extrêmement rare. »

Épisiotomie VS déchirure du périnée ?

Pendant longtemps, on a cru qu’il valait mieux une épisiotomie nette qu’une déchirure du périnée. Mais les études confirment que l’épisiotomie ne l’évite en rien. De plus il est démontré qu’une déchirure est moins douloureuse, plus superficielle et saigne moins qu’une épisiotomie dans les suites immédiates. Comme l’explique notre sage-femme :

« la déchirure permet meilleure cicatrisation car elle se fait naturellement dans le sens des fibres musculaires. »

Avez-vous le droit de refuser une épisio ?

Oui, vous pouvez refuser qu’on vous pratique une épisiotomie. Conformément aux recommandations de la Haute Autorité de Santé, l’épisiotomie doit être réalisée en accord avec vous et après qu’on vous a donné les informations nécessaires.

Mais avant de la refuser, vous pouvez aussi en amont choisir une maternité qui a un taux d’épisiotomie faible. Le monde a publié le taux d’épisiotomie dans les maternités en France pour vérifier à quelle échelle elle était pratiquée. Ces chiffres sont, vous l’imaginez bien, très utiles, pour choisir le lieu où vous accouchez.

Y a-t-il des solutions "miracle" pour l'éviter ?

Certains praticiens recommandent le massage périnéal quelques semaines avant l’accouchement avec une huile qui assouplit la peau. Cela peut aider !

En ce qui concerne la position de l'accouchement, certaines études publiées par le Collège National des Gynécologues et Obstétriciens Français ont montré que plutôt que la position classique “gynécologique” (allongé sur le dos) les positions verticales ou latérales pendant le travail pouvaient permettre un moindre recours aux épisiotomies.

La sexualité après l’épisiotomie

Comme dit précédemment, la cicatrisation d'une épisiotomie se fait en 3 semaines à 1 mois… Vous pourrez donc reprendre une activité sexuelle sans problème - et si vous en avez envie. Comme le précise Sanni Comte de manière rassurante :

« Toutes les femmes ont l’appréhension de la reprise des rapports sexuels après une déchirure ou épisio. Mais sachez que la cicatrice ne peut pas se rouvrir ! Par contre, après un accouchement et les perturbations hormonales qui s’ensuivent, il y a toujours une sécheresse vaginale physiologique. Mieux vaut donc prévoir un lubrifiant pour faciliter la reprise des rapports ».

En tout cas, les études publiées par le (très scientifique) Collège National des Gynécologues et Obstétriciens Français montrent que dans les 3 mois vous pourrez retrouver une vie sexuelle conforme à ce que vous avez connu ! Bien sûr au-delà des chiffres et des moyennes nationales, c’est à vous de retrouver vos sensations et reprendre (si vous le souhaitez) une activité sexuelle à votre rythme avec votre partenaire...

Merci à Sanni Comte, sage-femme à Paris.